Au milieu des occupations de septembre, les lectures de ce dimanche sonnent comme un douloureux rappel de notre difficulté à pardonner. Il semble acceptable, et même désirable, de faire grâce des petites offenses, mais peut-on pardonner l’impardonnable ? Le procès qui se tient actuellement aux assises de Paris pour les attentats de janvier 2015 – qui hantent encore la mémoire de notre quartier – met sous nos yeux l’impossibilité humaine du pardon. Pourtant, Jésus nous demande de pardonner « jusqu’à 70 fois sept fois » (Mt 18,22), c’est-à-dire sans limite, selon la symbolique du chiffre 7. Ce commandement ne peut se comprendre sans la parabole du débiteur impitoyable, que le Christ emploie devant Pierre pour l’encourager. Le pardon ne remplace ainsi jamais le droit de se défendre, ni celui d’obtenir justice. La preuve en est que le maître de la parabole reconnaît la dette immense de son serviteur, et lui en demande d’abord le remboursement. Ému de miséricorde, le bon maître accorde finalement la remise intégrale de la dette.
Lorsque nous pardonnons, nous nous souvenons devant le Seigneur que le frère qui nous a offensé à une dette envers nous. Mais comme le Seigneur nous pardonne, nous pouvons à notre tour recevoir la force de pardonner, afin que soit brisé le cercle infernal des vengeances et que la vraie justice advienne. Saint Jean-Paul II le proclamait en ces termes, à l’occasion de la journée mondiale de la paix, quelques mois seulement après les attentats du 11 septembre 2001 : « le pardon comporte toujours, à court terme, une perte apparente, tandis qu’à long terme, il assure un gain réel. La violence est exactement le contraire : elle opte pour un gain à brève échéance, mais se prépare pour l’avenir lointain une perte réelle et permanente. Le pardon pourrait sembler une faiblesse ; en réalité, aussi bien pour l’accorder que pour le recevoir, il faut une grande force spirituelle et un courage moral à toute épreuve. Loin de diminuer la personne, le pardon (…) la rend capable de refléter en elle un rayon de la splendeur du Créateur ».
Qu’à l’intercession de la Vierge Marie, le Seigneur nous montre les pardons que nous refusons et nous donne la force de les accorder.
Par le Père Benoît d’Arras