Seul l’homme peut être tenté, lui qui se compose d’un corps matériel et d’une âme spirituelle, et dont la raison, l’intelligence et la conscience sont libres, pour pouvoir discerner le bien et le mal et vouloir l’un ou l’autre. Seul l’homme peut être sujet à la tentation, en raison de sa triste hérédité due au péché originel.
Depuis le jour de la chute d’Adam de son état d’innocence à celui de pécheur, depuis le jour où la femme voulut connaître de près l’arbre interdit et où le Serpent put parler à Ève, l’homme se trouve perpétuellement près de l’arbre du bien et du mal autour duquel Lucifer s’enroule, et il subit la tentation.
Jésus, vrai Dieu et vrai homme, a voulu être tenté comme chacun de nous dans son humanité. Il n’a pas triché. Sa réponse aux tentations diffère de la nôtre sur un point essentiel : lorsque nous sommes tentés, nous pauvres pécheurs, le péché trouve toujours en nous une secrète connivence, parce que notre liberté est blessée. Mais personne ne peut reprocher à Jésus : « Toi, tu as pu résister parce que tu es Dieu, alors que moi je suis férocement attaqué dans ma chair. » Non, personne ne peut reprocher à Jésus une victoire facile ni se décourager sous prétexte d’une différence de création. Jésus s’est fait homme, avec une chair, une intelligence et une âme qui nous permettent de vivre, de comprendre et de vaincre. Il appartient à la descendance d’Adam autant que nous. Personne ne peut lui dire « Toi, tu n’avais pas le péché originel. Mais nous… » Adam aussi était sans péché originel, et il a néanmoins péché parce qu’il l’a voulu. Jésus, lui, a refusé de pécher.
Sa liberté d’homme était à ce point en harmonie avec la volonté du Père qu’une révolte ou un refus étaient proprement impensables. En tout il s’est voulu semblable à nous ; en tout sauf le péché. C’est l’une des facettes de son mystère, du mystère de sa personne de Fils de Dieu, vrai Dieu et vrai homme.