Moins connues et citées que celles de saint Matthieu (Mt 5), les Béatitudes de saint Luc (Lc 6), que nous entendons ce dimanche, ont une saveur plutôt radicale. Celles-ci nous sont directement adressées (à la deuxième personne) et se trouvent complétées de 4 malédictions, qui indiquent clairement aux chrétiens certains renoncements.
Les Béatitudes de Luc insistent ainsi sur la notion de manque, sous trois de ses formes : la pauvreté, le deuil et la persécution. Un bonheur est promis par le Christ à ceux qui font l’expérience de ce manque. Qu’est-ce que cela signifie ? Réfléchir à l’origine du terme « manque » va nous aider à y voir plus clair. D’après le travail de la langue, le « manque » partagerait une provenance commune avec la « main » et le « moine », c’est-à-dire celui qui est seul. Le manque est effectivement une privation, une absence de possession, une solitude qui revient concrètement à avoir les mains vides. Par opposition, le riche a lui les mains pleines. Le bonheur dont parle Jésus ne serait donc pas celui de rester les mains vides, mais de savoir que Dieu va les remplir si elles sont disponibles. Le philosophe Martin Steffens en parle spécifiquement à propos de nos Smartphones, qui occupent souvent nos mains. Lorsque que nous savons nous en séparer, nous sommes plus disponibles aux autres, au Christ et à nous-mêmes. Ce qui faisait dire à l’auteur, à propos de Jésus : « Il lui fallait des mains vides pour prendre celle de la belle-mère de Pierre, des doigts désencombrés pour laver les yeux de l’aveugle, des paumes ouvertes pour bénir la foule. Il lui fallait des mains percées pour ne pas retenir à lui les dons du Père mais les laisser aller, bien au-delà de lui. »
Que l’Esprit-Saint nous aide à accepter certains manques, non pour nous affliger mais pour mieux attendre et recevoir les promesses du Christ !